Le drapeau martiniquais défie l'ordre établi en Mai 1968
En Mai 1968, à Paris, la France était en proie à des bouleversements sociaux et politiques. Des manifestations et des grèves étaient organisées par les jeunes et les travailleurs pour protester contre les inégalités et les injustices. Les forces de l'ordre étaient déployées pour faire face à la crise, souvent avec des moyens violents.
Dans ce contexte de tension, Guy Cabort-Masson, un ancien officier de l'armée française, a décidé de se joindre à la manifestation avec des étudiants de l'AGEM, l'AGEG et l'UEG. Il s'est dirigé vers le centre de la ville en compagnie de deux étudiants Alex Ferdinand et Rodolphe Ramos et a brandi le drapeau martiniquais cousu par Madame Mencé, un symbole fort de la lutte pour la justice et la liberté pour les afro-descendants de la Martinique depuis le XIXème siècle. Ce drapeau, par ses couleurs rouge vert et noir, est aussi apparenté dans la sémiotique au drapeau du militant Marcus Garvey, qui avait lui-même lutté pour l'unité et la dignité des Africains et des descendants d'Africains dans le monde entier.
La scène a été marquante. Les forces de l'ordre, qui s'attendaient à un affrontement violent, se sont retrouvées face à un acte de résistance symbolique et non violent. Guy Cabort-Masson et les étudiants ont levé le drapeau haut devant les policiers, refusant de se laisser effrayer par la force brute de l'État.
Cet acte courageux a inspiré des milliers de personnes à se joindre à la manifestation dont les étudiants de la Guadeloupe porteurs du drapeau de la Guadeloupe rouge vert jaune étoilé et à réclamer leurs droits et leur liberté. La manifestation a continué sans heurts et les revendications des manifestants ont finalement été écoutés aboutissant à des réformes importantes dans le système politique et social de la France.
Le geste de Guy Cabort-Masson et des étudiants reste dans l'histoire comme un moment clé de la lutte pour la justice et la liberté en France, montrant l'impact que peut avoir un acte de courage sur un mouvement de changement. Il est également un écho à l'héritage de Marcus Garvey et à sa vision de l'unité et de la dignité pour tous les Africains et les descendants d'Africains dans le monde entier.
Quelques faits marquants à propos de l'œuvre des humanistes universels de la Martinique au XXème siècle :
1934 : le journaliste André Aliker du journal Justice, organe du Parti Communiste, ligôté et exécuté, les auteurs présumés acquittés.
1950 : le poète Aimé Césaire publie le "Discours sur le colonialisme".
1956 : le psychiatre Frantz Fanon publie "Les damnés de la terre", préface de Jean-Paul Sartre.
1961 : le poète Edouard Glissant est l'un des quatre fondateurs du Front antillo-guyanais pour l'autonomie (FAGA), avec Marcel Manville, Albert Béville (Paul Niger en littérature) et Cosnay Marie-Joseph, front dissous par l'autorité française en 1961.
1961 : l'officier Guy-Cabort Masson est condanmé à 20 ans de prison par contumance par le tribunal militaire pour désertion, amnistié par le Général de Gaulle en 1969
1962 : l'artiste peintre Joseph Réné-Corail signataire du manifeste "La Martinique aux Martiniquais" (OJAM) placé en détention à la prison de Fresnes avec 17 autres activistes, finalement acquittés par la justice française.
Autres ressources sur le drapeau martiniquais
Source : Alex Ferdinand, historien.
Version revue en 2019 en relation avec le film de Jocelyn Jonaz "Aporie du Drapeau Martiniquais" réalisé en juillet 2018 avec nouvel entretien avec Victor LESSORT et David MANGATAL
C'était un acte courageux