La Martinique elle aussi concernée par cette directive 2019/790 de l'Union Europeenne du droit d'auteur et des droits voisins dans le marché unique numérique, aussi connue en anglais sous le nom
EU Directive on Copyright in the Digital Single Market.
Si vous etes auteur ou artiste au sens large ou gestionnaire dans ce secteur vous etes sûrement concerné car cette directive devra être transcrite dans le droit de chaque Etat membre dans un délai de 2 ans.
Ce document rassemble outre une partie des , le point de vue d'artiste, de juriste, et il est possible de telecharger la directive elle meme telle que publiée au journal officiel de l'UE, à la fin de ce document
Pour l'heure, il est encore trop tôt pour connaître l'impact de cette directive sur les quelques 11,7 millions de personnes évaluées dans toute l'union europeenne travaillant et touchant des subsides du droit d'auteur et des droits voisins.
On peut cependant estimer qu'en raison du manque de préparation ou formation au changement lié à la technologie numérique, cela pourrait signifier "l'arrêt de mort de nombreuses structures de production et de nombreux artistes" vivant d'un modèle dont l'obslolescence est programmée desormais par ladite directive.
D'un point de vue d'un juriste, c'est bien sûr la transcription dans le droit national de chaque pays membre qui compte mais les consequences seront palpables, d'autant plus qu'il n'est pas dit que la crise sanitaire actuelle, déjà lourdes de conséquences pour des artistes privées de représentation et de contact meme distancé avec le public, ne viendra pas s'ajouter dans sa forme à venir aux difficultés de gestion de tout un pan de la société du divertissement en Europe et dans ses régions ultrapériphériques (RUP).
EU Directive on Copyright in the Digital Single Market
Bien qu'elle cite des sources diverses telles que le journal Libération, le journal officiel de l'Union Européenne, des sites spécialisés dans le droit, afin de vous informer,
notre source d'information est également pertinente pour se faire une idées des enjeux car elle est elle même concernée par ce changement, l'Assembleé Martinique en tant que source de contenu pour les plateformes numériques de grands éditeurs américains basée en Irlande, partie intégrante de l'UE.
Tombant sous l'application de ces futures nouvelles dispositions, on peut prévoir la gestion de contenu par des souscriptions d'abonnés qui seraient reversées à hauteur de 70% des revenus nets comme c'est le cas actuellement pour d'autres plateformes numériques possédées par le même géant.
De tels systèmes de souscriptions existent déjà sur des sites d'éditeurs franç,ais renommés tels que Mediapart, Le Monde, Le Figaro et par le biais aussi d'applications mobile distribuees par les géants du marché numérique qui pourraient ainsi imposer un nouveau modèle pour conserver leur mainmise sur les annonceurs tout en contrôlant l'audience remunerant ces éditeurs de presse numérique de dimension nationale.
Voilà, comment nous pouvons d'ores et déjà évoquer la source de ce changement à travers une démarche prédatrice venue du continent américain amèrement présentée par une artiste franco-belge Viktor Lazlo, qui tire son nom de scène d'un personnage du film de 1942 Casablanca tourné avec comme acteurs principaux Humphrey Bogart et Ingrid Bergman.
On voit dans sa déclaration ci dessous également la maniere dont elle fustige la procrastination de sa ministre de tutelle Roselyne Bachelot (ministre de la culture).
La Tribune de Viktor Lazlo
Chaque année, dans le paysage musical français, émergent de nouvelles voix, ou même d'anciennes qui n'ont pas fini de surprendre et qui refusent l'uniformité annoncée des majors, mammouths de la création qui s'essoufflent sans pour autant courir de grands risques.
Chaque année, grâce à de petits producteurs indépendants, ou à des artistes qui cumulent tous les métiers de la filière de la composition à la promotion, en passant par l'enregistrement, les mixages et la mise en ligne, les Français découvrent un paysage musical sans cesse renouvelé, sans se rendre compte qu'il y a derrière cette multitude de propositions, des artistes, artisans, qui souvent peinent à vivre de ce métier, la musique, que d'aucuns voudraient encore et malgré toutes les campagnes d'information qui ont circulé depuis l'invasion des plateformes de téléchargement, rendre accessible gratuitement à tous. De quoi vivraient les artistes ? A cette question, les conseilleurs ne sont jamais les payeurs.
Aujourd'hui, dans l'indifférence la plus totale de nos autorités, qui pourtant ont, bon an mal an, réussi à conserver un semblant de politique culturelle, se joue une partition au plus haut niveau juridique de l'Europe, qui signera l'arrêt de mort de nombreuses structures de production et de nombreux artistes, dont je suis.
De la réciprocité des droits d'auteur
Pour faire simple, les Américains ont intenté un procès aux producteurs irlandais afin de récupérer les droits de diffusion de leurs artistes, qui représentent à peu près 40% de la diffusion irlandaise et ils l'ont gagné. Ce précédent les a encouragés à réclamer la rétribution des artistes américains au niveau européen diffusés dans les mêmes proportions qu'en Irlande, sous prétexte que la France et tous les autres pays, signataires des traités internationaux permettant la réciprocité des droits d'auteur, empochent illégalement ceux qui devraient leur revenir.
Fort bien, pensez-vous comme moi, à cela près que cet argent n'ira jamais dans la poche desdits artistes puisque les Etats-Unis n'appliquent pas le droit d'auteur et ne rétrocèdent pas le moindre centime sur les musiques extra-étasuniennes diffusées dans leur pays. Cet argent ira directement dans la poche des Gafa et autres grands groupes de production qui ne demandent qu'à gonfler un peu plus encore. La réciprocité est un concept qui n'a pas cours dans ce pays où le pire comme le meilleur de l'homme s'exprime en alternance.
Mais venons au motif de mon cri de colère. En France, les droits des artistes américains qui font partie de ce que l'on appelle les non répartissables, servaient jusqu'à présent à aider la production indépendante, sous forme de multiples aides proposées par les organismes de gestion collectives que sont l'Adami, la Spedidam, le FCM, le SCPP... et d'autres. Sans cette manne miraculeuse (il fallait là se réjouir de l'incurie des Américains), des centaines de projets tombent à l'eau, car ces sociétés ne disposent pas d'autres fonds pour combler l'absence de maisons de disques ouvertes à la diversité culturelle et les producteurs pauvres, qui activent ces guichets en complément de leurs maigres ressources, se retrouvent le nez dans la panade, à devoir annoncer tous azimuts à leurs artistes impatients, que non, il n'y aura pas d'enregistrement possible. Pas de disque = pas de concert = pas de renouvellement du répertoire = pas de survie possible.
Le silence de Roselyne Bachelot
Vous me répondrez peut-être que le commun des mortels n'en a rien à faire des artistes, qu'il y aura toujours assez (trop) de musique et que c'est tant mieux pour eux, ils n'avaient qu'à choisir un vrai travail ou devenir tourneur-fraiseur. Eh oui, c'est pourtant bien nous, les saltimbanques, chanteurs, auteurs, compositeurs, interprètes, écrivains et cinéastes, acteurs et danseurs, qui avons nourri et ensoleillé votre quotidien pendant la sinistre période qui vient de se dérouler et qui semble nous pendre à nouveau au nez.
Pourtant, peu d'entre vous soupçonnent la profondeur du gouffre au bord duquel nous pousse cette grave décision de justice, car nous n'avons pas entendu un mot de notre ministre de tutelle, Mme Bachelot. Lorsque ces décisions ont été prises, au début de son mandat, que ne s'est-elle pas exprimée, que n'a-t-elle tapé du poing sur la table, alors qu'à Bruxelles, face au parlement européen, les lobbyistes américains ont dépensé des millions d'euros pour faire pencher la balance des décisions dans le sens du droit américain ? Que sommes-nous face à cette masse financière si nous n'avons même pas l'assurance d'être sinon protégés, au moins défendus par nos élus ? Si aujourd'hui, la seule voie qui nous reste est celle de la pétition, vous qui avez aimé nous écouter, nous regarder et nous lire, levez-vous avec nous, pour que ne meurent pas la majorité des artistes français. Pour que nous ne crevions pas dans l'indifférence générale.
Le Parlement européen a adopté l'an dernier un texte pour réguler l'utilisation en ligne de contenus protégés afin d'assurer un équilibre entre les géants de l'internet et, en face d'eux, les éditeurs, médias et artistes, qui représentent des secteurs employant 11,7 millions de personnes et générant un chiffre d'affaires cumulé de 1.000 milliards de dollars.
Le texte, qui doit être transposé en droit national dans un délai de deux ans par tous les Etats membres, a fait l'objet de consultations publiques qui ont été prises en compte par la Commission européenne.
(Source : Libération)
Explications sur le droit d'auteur americain
L'inquiétude est vive chez les artistes et producteurs français après la décision, le 8 septembre dernier, de la Cour de justice européenne qui chamboule profondément le système de répartition de certains droits et fragilise, de ce fait, les dispositifs de soutien à la création en France. En jeu, plus de 30 millions d'euros d'aides annuelles distribuées par les organismes de gestion collective des droits des artistes-interprètes (Adami, Spedidam) et des producteurs (SPPF, SCPP) qui pourraient tout simplement disparaître. Explications.
à quoi correspondent ces 30 millions ?
Ils appartiennent à la grande famille des droits voisins du droit d'auteur qui concernent les artistes-interprètes et les producteurs. Ils proviennent de la " rémunération équitable ", c'est-à-dire la redevance versée par les radios, télévisions ou lieux publics en échange de la libre diffusion des œuvres. Une fois collectés, ces droits sont répartis entre artistes et producteurs par les Organismes de gestion collective (OGC), à l'exception d'une partie de cette somme, considérée comme " non répartissable ". Elle correspond aux droits des artistes-interprètes et producteurs de pays tiers à l'Union européenne, qui n'ont pas signé la convention de Rome en 1961.
Cette convention internationale, qui protège les droits des artistes exécutants, permet aux pays signataires (quatre-vingt-quinze à ce jour) d'appliquer le critère de réciprocité : on ne peut verser de droits à des ressortissants d'un pays qui n'octroie pas lui-même ces droits. Ainsi, la France ne verse pas de rémunération équitable aux interprètes américains puisque les états-Unis, non signataires, n'en versent pas. Donnant donnant, ou rien du tout. Ces droits juridiquement " non répartissables " s'élèvent à environ 30 millions d'euros chaque année.
à quoi servent-ils aujourd'hui ?
En France, depuis la création de la rémunération équitable en 1985, la loi Lang prévoit de diriger ces sommes " non répartissables " vers l'aide à la création, via les organismes de gestion collective. Le principe était jugé vertueux : des droits collectés, mais ne pouvant être distribués, contribuaient à la création artistique en général. Ainsi chaque année, l'Adami, la Spedidam, la SPPF et la SCPP attribuent au total entre 30 et 35 millions de subventions à des projets de films, des enregistrements, des actions de formation, du soutien à l'emploi... En 2019, l'Adami a, par exemple, distribué 15 millions d'euros à 1 371 projets, soit près de 10 000 euros en moyenne par projet.
Pourquoi risquent-ils de disparaître ?
Le 8 septembre 2020, la Cour de justice européenne a jugé que le critère de réciprocité n'était pas applicable en matière de droits voisins, car il n'était pas établi au niveau européen. En conséquence, elle estime que tous les artistes-interprètes, quel que soit leur pays d'origine, ont droit à une rémunération équitable. La cagnotte des " irrépartissables " doit désormais être versée à tous ses ayants droit, et notamment aux OGC américains qui représentent l'essentiel de ces droits non répartissables. étrangement, ce n'est pas une réclamation d'une quelconque société d'auteurs non-européenne qui a entraîné ce jugement de la cour européenne, mais un conflit entre deux OGC irlandais (l'un d'artistes, l'autre de producteurs), en désaccord sur le partage de ces " non répartissables " justement. Un conflit du même ordre agitait les OGC français, cette fois-ci entre la SCPP (majors) et la SPPF (labels indépendants). Il est désormais caduc.
Est-ce vraiment catastrophique ?
Pour les artistes du monde entier, c'est une bonne nouvelle, dont s'est réjoui l'OGC américain SoundExchange, qui y voit la fin d'une discrimination injuste. Mais pour les OGC français, c'est une perte sèche et immédiate dans leur budget d'aide à la création. à la Spedidam, ces " non-répartissables " représentaient en 2018 près du tiers de ce budget (6 millions sur 17 millions distribués). Le cadre d'application de la décision de la Cour de justice européenne est encore à préciser, mais le jugement est définitif. Il pourrait même être rétroactif sur cinq ans, ce qui obligerait les OGC français à rembourser près de 140 millions d'euros.
En France, des discussions sont en cours avec le ministère de la Culture pour trouver une issue à ce problème qui remet en cause une partie non négligeable de nos dispositifs de soutien à la création, ont alerté l'Adami, la Spedidam et la SPPF dans leurs communiqués de presse. Une solution possible serait de ratifier au niveau européen le critère de réciprocité. Mais les situations sont hétérogènes selon les pays de l'Union, il ne sera peut-être pas simple d'avoir une ligne commune à ce sujet.
Sur l'usage commercial - Carine Bernault (juriste)
L'usage commercial n'est pas prohibé. En 2009, l'opérateur Orange a créé un miroir de l'encyclopédie participative. Lorsqu'un internaute utilisait le moteur de recherche d'Orange, les résultats proposés substituaient le miroir créé par Orange au site wikipédia. Les textes et images étaient identiques mais Orange y ajoutait des publicités et s'enrichissait grâce à l'exploitation de "contenus" qui ne lui avaient rien coûté. Rien dans la licence n'interdisait une telle pratique. Autre exemple : le célèbre site FlickR, qui appartient à Yahoo, permet de diffuser des photographies sur internet. Il offre aux internautes qui diffusent leurs œuvres la possibilité d'y associer la licence Creative Commons de leur choix. Le groupe Yahoo a annoncé en 2014 son intention de se livrer à une exploitation commerciale de certaines des photographies diffusées sur FlickR. Les auteurs qui ont opté pour la licence autorisant l'usage commercial ne peuvent s'y opposer ni exiger la moindre rémunération alors que leur intention première n'était probablement pas d'enrichir Yahoo. Naissent alors des interrogations sur l'économie de ces créations partagées et sur la situation des auteurs bénévoles.
On voit bien dans l'appel lancé par Viktor Lazlo d'où vient la transformation orchestré,e par la directive et des transfers de fonds dits non répartissables déjà en cours. L'exemple de Carine Bernaut montre qu'il ne s'agit pas juste d'une simple prédation des puissances américaines puisque des groupes Européens tirent eux aussi partie de ce flou juridique.
En tout cas, il convient maintenant d'examiner le point de vue de l'autre partie le legislateur europeen, par l'exposé des motifs. Cela permet au grand public de découvrir les motivations de changement et de lois futures, aprè le motif du cri de colè de l'artiste.
L'expose des motifs de la directive europeenne
La protection offerte par ce cadre juridique contribue également à la réalisation de l'objectif de l'Union visant à respecter et à promouvoir la diversité culturelle, tout en mettant en évidence l'héritage culturel commun de l'Europe.
L'évolution rapide des technologies continue à modifier la manière dont les œuvres et autres objets protégés sont créés, produits, distribués et exploités. Il apparaît sans cesse de nouveaux modèles économiques et de nouveaux acteurs. La législation en la matière doit résister à l'épreuve du temps afin de ne pas entraver l'évolution des technologies. Les objectifs et les principes définis par le cadre de l'Union en matière de droit d'auteur restent satisfaisants. Néanmoins, une insécurité juridique subsiste, tant pour les titulaires de droits que pour les utilisateurs, en ce qui concerne certaines utilisations, notamment transfrontières, d'œuvres et autres objets protégés dans l'environnement numérique. Comme l'indique la communication de la Commission du 9 décembre 2015 intitulée "Vers un cadre moderne et plus européen pour le droit d'auteur", il est nécessaire, dans certains domaines, d'adapter et de compléter le cadre actuel de l'Union en matière de droit d'auteur, tout en maintenant un niveau élevé de protection du droit d'auteur et des droits voisins. La présente directive prévoit des règles visant à adapter certaines exceptions et limitations au droit d'auteur et aux droits voisins à l'environnement numérique et transfrontière, ainsi que des mesures destinées à faciliter certaines pratiques d'octroi de licences, notamment, mais pas seulement, en ce qui concerne la diffusion d'œuvres indisponibles dans le commerce et d'autres objets protégés, et la disponibilité en ligne d'œuvres audiovisuelles sur les plateformes de vidéo à la demande, en vue d'assurer un accès plus large aux contenus. Elle contient également des règles destinées à faciliter l'utilisation de contenus qui sont dans le domaine public.
De même qu'il devrait exister un mécanisme de révocation des droits que les auteurs et artistes interprètes ou exécutants ont transférés sur une base exclusive.
Il convient donc de réévaluer, à la lumière de ces nouvelles utilisations, les exceptions et limitations prévues actuellement dans le droit de l'Union qui sont pertinentes pour la recherche scientifique, l'innovation, l'enseignement et la conservation du patrimoine culturel. Il y a lieu d'instaurer des exceptions ou limitations obligatoires pour l'utilisation de technologies de fouille de textes et de données, l'illustration dans le cadre de l'enseignement dans l'environnement numérique et pour la conservation du patrimoine culturel
Ces technologies (fouille de texte et de données) bénéficient aux universités et à d'autres organismes de recherche, de même qu'aux institutions du patrimoine culturel,
Les états membres ne devraient, dès lors, pas prévoir de compensation pour les titulaires de droits en ce qui concerne les utilisations relevant des exceptions en matière de fouille de textes et de données introduites par la présente directive.
Cette situation pourrait entraver le développement des activités d'enseignement s'appuyant sur le numérique et de l'enseignement à distance. Par conséquent, l'introduction d'une nouvelle exception ou limitation obligatoire est nécessaire pour garantir que les établissements d'enseignement bénéficient d'une sécurité juridique totale en cas d'utilisation d'œuvres ou autres objets protégés dans le cadre d'activités pédagogiques numériques, notamment en ligne et dans des situations transfrontières.
Les états membres devraient rester libres de prévoir une compensation équitable pour les titulaires de droits en contrepartie des utilisations numériques de leurs œuvres ou autres objets protégés dans le cadre de l'exception ou de la limitation prévue par la présente directive à des fins d'illustration dans le cadre de l'enseignement. Lors de la détermination du niveau de la compensation équitable, les états membres devraient dûment tenir compte, entre autres, de leurs objectifs éducatifs et du préjudice causé aux titulaires de droits. Les états membres qui décident de prévoir une compensation équitable devraient encourager l'utilisation de systèmes qui n'entraînent pas de charge administrative pour les établissements d'enseignement
Les institutions du patrimoine culturel œuvrent à la conservation de leurs collections pour les générations futures.
Les états membres devraient, dès lors, être tenus de prévoir une exception permettant aux institutions du patrimoine culturel de reproduire des œuvres et autres objets protégés qui se trouvent à titre permanent dans leurs collections à des fins de conservation, par exemple pour remédier à l'obsolescence technologique ou à la dégradation des supports originaux, ou pour assurer ces œuvres et autres objets protégés.
La directive prévoit un système rigoureux et performant de gestion collective avec des règles de bonne gouvernance, de transparence et de communication d'informations, ainsi que la distribution et le versement réguliers, avec diligence et exactitude, des sommes dues aux titulaires de droits individuels
les agrégateurs d'informations ou les services de veille médiatique, pour lesquels la réutilisation de publications de presse constitue une partie importante de leurs modèles économiques et une source de revenus.
Article 15. Les états membres prévoient que les auteurs d'œuvres intégrées dans une publication de presse reçoivent une part appropriée des revenus que les éditeurs de presse perçoivent des fournisseurs de services de la société de l'information pour l'utilisation de leurs publications de presse.
L'avis de juristes
Le texte de la directive a été ardemment discuté pendant plus de 2 ans et demi. Ce qui est énorme !
L'objectif de la directive a été d'une part de moderniser le droit d'auteur à l'ère numérique et, d'autre part, d'inciter les plateformes électroniques à mieux rétribuer les auteurs, les artistes et les journalistes. Lancés en 2016, les débats européens ont été agités entre auteurs et médias d'un côté, en lutte pour une meilleure rémunération et qui devront recevoir " une part de tout revenu lié au droit d'auteur obtenu par leur éditeur de presse ", et géants du numérique de l'autre, dont Facebook, YouTube et Google, qui souhaitent une protection moins stricte.
Deux articles du texte européen ont été vraiment au cœur des controverses.
L'article 11 (devenu par après, l'article 15) prévoit de créer un " droit voisin " des éditeurs et agences de presse, qui leur permettra d'être rémunérés pour la réutilisation de leur production par des moteurs, comme GoogleNews, ou des réseaux sociaux, comme Facebook.
L'article 13 (devenu article 17) oblige quant à lui les plateformes à retirer des contenus qui n'auraient pas fait l'objet d'un accord de licence entre ces dernières et les titulaires de droits. Les sites seront dorénavant responsables du contenu que leurs utilisateurs mettent en ligne.
Exceptions : certaines productions, comme les mèmes ou les GIF, pourront toutefois être partagées librement, tels les liens vers des articles d'actualité, accompagnés de " mots isolés ou de très courts extraits. ".
De plus, l'article 18 prévoit le droit à une " rémunération appropriée et proportionnelle " pour les auteurs et les artistes (les créateurs européens). Ils pourront renégocier une rémunération plus équitable au vu des bénéfices que tire le distributeur de l'exploitation de leurs droits.
Le texte a été salué comme une victoire pour les créateurs en Europe : après 26 mois de négociations, entre campagnes de lobbying et mobilisation de milliers d'auteurs, réalisateurs, scénaristes pour défendre les droits des créateurs.
Certains craignent toutefois que le texte instaure une censure généralisée du web.
Analysons ici succinctement quelques conséquences de ce texte.
Conséquences et impacts pour les entreprises.
1. éditeurs de presse.
Clairement, les éditeurs de presse (Rossel, Roularta, Le Monde, etc.) auront une base juridique pour négocier face à, par exemple, Google pour son service GoogleNews.
Rappelons que la presse belge (associée aux auteurs journalistes et scientifiques) avaient gagné le litige contre Google en 2007 (première instance) et 2011 (appel).
Les éditeurs de presse pourront négocier avec les plateformes comme GoogleNews mais aussi avec Facebook, LinkedIn ou Twitter, pour l'utilisation en ligne de leurs publications de presse. Il est évident que c'est GoogleNews qui vient le premier à l'esprit mais les autres plateformes que nous venons de mentionner sont aussi concernées dans la mesure où elles ne pourront pas bénéficier des exceptions mentionnées par la directive.
En effet, le texte européen mentionne trois cas où les éditeurs ne pourront pas négocier :
pour les utilisations des publications de presse faites par des utilisateurs individuels (que ces utilisations soient faites à titre privé ou non commercial) ;
pour les actes liés aux hyperliens ;
en ce qui concerne l'utilisation de mots isolés ou de très courts extraits d'une publication de presse.
La licence a un champ d'application très étroit :
1. elle ne concernera plus les articles qui auront plus de deux ans d'existence (le droit voisin des éditeurs a donc une durée d'existence très court à l'inverse des droits des auteurs qui s'éteignent 70 ans après leur décès) ;
2. elle ne s'appliquera pas aux publications de presse publiées pour la première fois avant la date d'entrée en vigueur de la directive.
La rémunération perçue par les éditeurs de presse devra être partagée avec les auteurs. En effet, la directive prévoit que ces derniers devront en recevoir " une part appropriée ". Que recouvre cette expression, nul ne le sait pour l'instant...
2. Producteurs audiovisuels.
La disposition phare de la directive !
Dorénavant, les producteurs audiovisuels pourront négocier des licences avec les " fournisseurs de services de partage de contenus en ligne " pour les actes de communication au public que ces fournisseurs réalisent. Il s'agit des YouTube et DailyMotion mais non les Wikipedia, les Dropbox, les ebay.
Dans le cas où ces plateformes de partage refusent de conclure des accords, elles pourraient voir engager leur responsabilité (sous certaines conditions).
3. éditeurs de livres, producteurs et SVOD.
Les éditeurs de livres voient eux leurs droits restreints par l'instauration de nouvelles possibilités pour les chercheurs scientifiques, les institutions culturelles, les établissements d'enseignement et pour les auteurs de livres. Par contre, les éditeurs (de presse et de livres) ainsi que les producteurs d'œuvres audiovisuelles pourraient bénéficier de nouvelles possibilités grâce aux licences collectives étendues.
a) Chercheurs scientifiques
Les organismes de recherche et les institutions du patrimoine culturel pourront procéder, à des fins de recherche scientifique, à des fouilles de textes et de données ("text&data mining") sur des corpus de documentation auxquels ils ont déjà accès de manière licite.
Qui est concerné par cette possibilité ?
Les bibliothèques accessibles au public, les musées, les archives et les institutions dépositaires d'un patrimoine cinématographique ou sonore.
Qu'est-ce que la fouille de textes et de données ?
Il s'agit des techniques d'analyse automatisée visant à analyser des textes et des données numériques afin d'en dégager des informations (des constantes, des tendances, des corrélations, etc.).
Auparavant, les éditeurs considéraient qu'ils pouvaient aussi facturer la réalisation de cette activité par les chercheurs. Dorénavant, la fouille de textes et de données pourra être réalisée sans augmentation de la licence octroyant l'accès aux documents.
b) Les établissements d'enseignement.
Les Etats membres pourront prévoir que les établissements d'enseignement peuvent utiliser numériquement tout matériel d'enseignement (et ce même à titre gratuit si l'Etat membre en décide ainsi).
Cette utilisation est toutefois très encadrée :
elle ne peut avoir pour but qu'à des fins exclusives d'illustration dans le cadre de l'enseignement ;
dans la mesure justifiée par le but non commercial poursuivi par l'établissement d'enseignement ;
l'utilisation ait lieu sous la responsabilité de l'établissement d'enseignement, dans ses locaux ou dans d'autres lieux ;
ou au moyen d'un environnement électronique sécurisé accessible uniquement aux élèves, aux étudiants et au personnel enseignant de cet établissement.
En fonction du choix futur du législateur national, les éditeurs ne pourront peut-être plus dans le futur conclure des licences avec les établissements d'enseignement pour de telles utilisations.
c) éditeurs et producteurs.
La directive étend dans toute l'Europe le système des licences collectives étendues qui fonctionnent depuis de nombreuses années dans les pays nordiques.
Ce système permet aux sociétés de gestion de conclure des accords dans des domaines d'utilisations bien définis. Ces accords concernent les membres de la société de gestion en question mais, de par une fiction juridique, s'étend aux non membres de la société de gestion. La licence doit recevoir une certaine publicité pour avertir ces non membres et leur permettre de demander la sortie de leurs œuvres de ladite licence. La licence ne peut être conclue que par une société de gestion qui est " suffisamment " représentative de la catégorie d'œuvres concernées.
Les licences collectives étendues sont utilisées dans les pays nordiques pour toute sorte d'utilisation : numérisation de masse, utilisation audiovisuelle.
Selon la loi nationale de transposition de la directive, il se pourrait que de nouvelles opportunités de licences s'ouvrent aux producteurs et aux éditeurs pour permettre, par exemple, une utilisation commerciale plus poussée de leurs archives.
d) Les plateformes de vidéo à la demande.
La directive prévoit des mesures de facilitation pour les entreprises qui veulent ouvrir des plateformes de vidéo à la demande.
En effet, les Etats membres devront faire en sorte que, dans le cas où ces entreprises rencontrent des difficultés en matière d'octroi de licences de droits, puissent recourir à l'assistance d'un organisme impartial ou de médiateurs. L'organisme impartial établi ou désigné par l'Etat membre et les médiateurs devront apporter leur assistance aux différentes parties en cause dans la négociation et les aider à aboutir à un accord, y compris, le cas échéant, en leur soumettant des propositions.
e) Auteurs et artistes.
Les entreprises audiovisuelles, les producteurs de disque ainsi que les éditeurs de livres et de presse devront revoir les contrats qui les lient avec leurs auteurs ou artistes.
En effet, la directive prévoit dorénavant que :
"lorsque les auteurs et les artistes interprètes ou exécutants ont octroyé sous licence ou lorsqu'ils ont transféré leurs droits exclusifs pour l'exploitation de leurs œuvres ou autres objets protégés à un cocontractant, ils ont le droit de percevoir une rémunération " appropriée et proportionnelle ".
Ce que recouvre cette expression n'est pas encore connue. L'Etat membre va-t-il fixer un pourcentage minimum ? Va-t-elle laisser les parties décider de cette rémunération appropriée et proportionnelle (et donc le juge in fine) ?
Les auteurs et les artistes devront recevoir annuellement des informations sur les exploitations de leurs œuvres.
La directive introduit aussi ce que l'on appelle la clause de succès :
L'Etat membre devra veiller à :
" ce que les auteurs et les artistes interprètes ou exécutants ou leurs représentants aient le droit de réclamer à la partie avec laquelle ils ont conclu un contrat d'exploitation des droits ou aux ayants droits de cette partie, une rémunération supplémentaire appropriée et juste lorsque la rémunération initialement convenue se révèle exagérément faible par rapport à l'ensemble des revenus ultérieurement tirés de l'exploitation des œuvres ou des interprétations ou exécutions. ".
Ce mécanisme ne jouera pas s'il existe accord collectif applicable prévoyant un mécanisme comparable. Ce sera donc une analyse au cas par cas.
Enfin, le texte européen va obliger les producteurs et éditeurs à réellement exploiter les œuvres dont ils ont obtenu les droits via des licences ou des transferts de droits. En effet, s'ils n'exploitent pas les œuvres, les auteurs et les artistes pourront demander à récupérer leurs œuvres (révoquer les licences). L'Etat membre pourra encadrer dans le temps l'exercice de ce droit de révocation.
" Licences réciproques " et droit d'auteur : l'économie collaborative au service des biens communs ?
Telecharger la directive europeenne 2019/790 du droit d'auteur, droits voisins dans le marche unique numerique du 17 Avril 2019
ça a l'air compliqué.